Αρχείον Ιωάννου Καποδίστρια, τ. ΣΤ΄
Title: | Αρχείον Ιωάννου Καποδίστρια, τ. ΣΤ΄ |
Date of Publication: | 1984 |
Pagination: | 322 |
Subject: | Κείμενα (1819-1822) |
Temporal coverage: | 1815-1822 |
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Audience du roi
En me comblant de bontés et après s’ être informé de ma santé et des voyages que je venais de faire pour la rétablir, le roi me demanda: "Que pensez-vous de la France?, Vous venez de parcourir quelques uns de ses départements, vous êtes à Paris. Dites-moi avec franchise, avons-nous fair des progrès depuis l’ année 1815? Est-on content de nous, ou bien a-t-on droit de nourrir des inquiétudes à notre égard?”
"Puisque v.m. l’ ordonne, je prendrai la liberté d’ observer qu’en considérant la France sous les rapports de ses intérêts matériels, elle a fait sans contredit de grands progrès depuis l’ année 1815. Mais pourrait - on en dire autant, en la considérant sous le point de vue de ses intérêts moraux et politiques?”
"Non, — reprit le roi avec vivacité. - Mais comment prétendre en si peu de temps à un si grand résultat?”
"Ce serait trop prétendre, Sire, si l’on s’attendait à voir déjà consommée l’ oeuvre de la restauration morale du peuple français et de son gouvernement représentatif. Mais ce qu’on espérait, c’était de voir avancer cette oeuvre selon les principes immuables qui semblaient avoir servi de base à son commencement".
"Les principes sont les mêmes. Ils sont et doivent être, comme vous le dites, immuables”.
Le roi parla alors longtemps des rapports intérieurs de la France, des peines qu’il se donnait pour le rallier au centre commun du gouvernement représentatif, des entraves opposées par les partis exagérés, de l’ indocilité des uns et des autres, du système du fusion qu’il suit avec persévérance et dans ces derniers temps avec succès.
"Un étranger, Sire, ne peut point en juger. Moins encore oserait - il se permettre une opinion quelconque sur une question de cette nature, lorsque c’est v.m. qui la pose. Aux yeux cependant des cabinets européens le système administratif de la France n’est plus le même depuis le mois de janvier, quelque immuables que v.m. considère les principes sur lesquels il se fonde.
En affaires, tout est action et l’ action d’un gouvernement n’est signalée que par les mesures qu’il prend. Or, la recomposition de votre ministère, Sire, à la clôture des conférences d’Aix-la-Chapelle est un fait qui annonce, ou paraît du moins vouloir annoncer, le renversement du système que le gouvernement français a suivi depuis l’ année 1815, après avoir obtenu des succès que la postérité croira exagérés, pour ne pas dire fabuleux”.
En récapitulant les faits qui viennent à l’ appui de cette observation, il m’a été facile de passer en revue les grands services que le ministère de s.m. avait rendus à la France lors des négociations de Paris de l’ année 1815, durant 1’
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occupation militaire et en tout dernier lieu aux conférences d’Aix-la-Chapelle.
Le changement de ce même ministère, les actes qui caractérisent l’ administration de celui qui le remplace, la précipitation avec laquelle ces actes se suivent et dans une direction exclusivement favorable non seulement à la masse des intérêts, mais aux hommes les plus marquants de la révolution, - tels sont les faits qui semblent commander, si ce n’est la méfiance la plus juste, du moins 1’ attention la plus soutenue de la part des puissances à l’ égard de la France.
Replacée deux fois sous le sceptre de ses rois, présentée à l’ Europe comme l’ alliée des grandes puissances et le garant solidaire de la tranquillité générale et de la paix, la France paraît dédaigner tous ces avantages et préférer l’ attitude isolée que lui donne le protocole reservé des conférences d’ Aix-la-Chapelle.
"Non, Monsieur, c’est bien le contraire qui fait l’objet de tous mes voeux et de tous mes efforts. Point d’isolement. Point d’alliances partielles. La France a contracté l’ engagement de maintenir solidairement avec les autres puissances le système conservateur que les traités sanctionnent, et elle remplira cet engagement avec fidélité, je vous en réponds”.
"Dans ce cas il reste toujours à désirer que l’opinion des autres cabinets à l’égard de la situation intérieure de la France devienne aussi rassurante pour le présent comme pour l’ avenir, qu’elle semble l’ être dès ce moment aux yeux de v.m.
Ne doutant nullement de vos intentions, Sire, vos alliés peuvent et doivent même douter des suites qui semblent se rattacher aux changements qui viennent d’ être opérés dans la composition et dans la marche de ce gouvernement.
Dès lors le sort de la France et la tranquillité générale de l’ Europe sont soncidérés à juste titre comme un grand problème que le temps seul peut résoudre, tandis que jusqu’au mois de janvier quelques données rendaient la décision de ce problème favorable aux grands intérêts de la France et de la famille européenne”.
"Je vous entends. Je vois la chose comme vous. Aussi j’ai fait tout ce qui dépendait de moi pour faire aller mon ministère sans y apporter des changements. Vous n’ignorez pas toutes les peines que je me suis données pour y faire rester le duc de Richelieu. Il a voulume quitter.
Je sens, mais avec infiniment de douleur, les méfiances que les derniers événements peuvent avoir excitées. Mais c’est le temps qui né rendra justice. Il prouvera à mes alliés que je ne dévierai nullement du système statué par les actes d’Aix-la-Chapelle et que j’en ferai autant quant à la France, en la gouvernant selon la charte et les principes de justice et de conciliation qui en font la base”.
C’est ici où le roi crut devoir justifier la nomination des pairs, la loi sur la liberté de la presse, le rappel des proscrits et une foule d’autres délibérations qu’il pense être selon la lettre de la charte et plus encore dans l’esprit d’un gouvernement représentatif.
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Voyant que dans cette longue narration le roi oubliait les mesures prises en dernier lieu relativement à l’armée, j’ai pris la liberté d’y ramener la conversation, en parlant, de l’ opinion qu’on en avait dans l’ étranger.
"La garde royale à la formation de laquelle v.m. a pris tant d’intérêt l’ année 1815, paraît être considérée maintenant par le gouvernement comme un inconvénient dont il serait bien aise de se débarrasser.
L’ armée par contre énvisagée l’ année 1815 comme le plus dangereux des héritages de la révolution, devient aujourd’hui l’ objet de toutes les prédilections du ministère et semble se reconstruire plutôt comme un instrument de politique intérieure, que comme un moyen militaire d’ordre et de tranquillité”.
J’ai développé ces deux observations, en citant les faits. Le roi après m’avoir écouté avec infiniment d’ indulgence, reprit:
"Les règlements dont vous parlez quant à la garde, ont été adoptés sous la présidence de M. de Richelieu et du consentement du duc d’ Angoulême.
On a exagéré les avantages qu’on a procurés à de vieux soldats, à des officiers distingués. D’ailleurs, ils m’ont donné et me donnent des preuves de dévouement. Je ne puis pas les abandonner au désespoir. Ce serait les forcer à devenir les ennemis du trône.
Vous restez quelques jours encore à Paris. Voyez par vous-même les choses. Parlez à mes ministres. Je ne doute point que vous n’ empropriez l’ idée la plus avantageuse de notre position. Il ne tient à coeur que l’ empereur Alexandre en juge. Son suffrage est aussi important dans le monde que son estime et son amitié me sont chères.
Mais n’ ecoutez pas le général Pozzo. Il ne nous aime plus. Il n’est plus le même à l’ égard de mes ministres”.
"Le général Pozzo, Sire, doit avant tout remplir les ordres de l’ empereur. Il doit donc s’ abstenir de toute communication quelconque qui sort des formes strictement officiells. Et nulle affaire intérieure de la France ne peut désormais faire l’ objet d’une sollicitude particulière de la part des puissances alliées. Leur attitude relativement à la France est définie par les actes d’Aix-la-Chapelle. Il en peut appartenir à aucune des puissances alliées d’en prendre une plus ou moins favorable à la marche intérieure du gouvernement français sans encourir une immense et redoutable responsabilité, sans porter atteinte à l’esprit et à la lettre des engagements renouvelés à Aix-la-Chapelle”.
"Non, je ne vous demande pas que le général Pozzo fasse l’ apologie de mes ministres. Mais je désire qu’il leur témoigne de la confiance”.
En me parlant de ses ministres, le roi me fit sentir q’il ne s’agissait que de M. Decazes.
Aussi c’est lui que s.m. m’ a recommandé de voir le plus souvent et très particulièrement. "C’est lui qui est l’homme de toute ma confiance et que j’aime beaucoup”.
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En se levant de son fauteil, le roi m’ engagea à me présenter chez lui encore une fois avant mon départ.
L’audience ayant duré presque une heure et le roi paraissant fatigué des longs discours qu’il avait faits, je n'ai pas osé reprendre la question de la garde et de l’ armée, ni ré ondre plus en détail à ce qui concerne la considération européenne dont s.m. semblait désirer que son ministère actuel ou, pour mieux dire, M. Decazes, fût environné.
Je tâcherai de m’ acquitter de ce double devoir dans mon audience de congé.
Entretien avec s.a.r. M. le comte d’ Artois
S.a.r. déplore les mesures par lesquelles la force principale du gouvernement français se trouve placée entre les mains des ennemis du trône légitime.
En développant sa pensée, s.a.r. orbserve qu’il ne s’agit pas de la charte, mais des hommes qu’on choisit pour la mettre en oeuvre.
Elle convient que la France ne peut plus être gouvernée selon les anciennes institutions. Mais elle croit que celles dont elle jouit maintenant, pourraient être avec plus de justice et de sécutité confiées à des Français qui ont donnée des preuves de fidélité et dont le sort s’identifie, pour ainsi dire, à celui de la dynastie.
En s’abstenant de toute ingérence quelconque, s.a.r. doit s’occuper de l’ avenir et s’en occupe. Elle fait des voeux sincères pour la conservation des jours du roi, son frère. Mais pour le cas où la couronne vint un jour à tomber sur sa tête, elle aime à faire connaître dès ce moment à l’ empereur de Russie sous quel point de vue elle envisage la situation actuelle des choses, quelles sont les améliorations qu’elle croirait de son devoir et de sa conscience d’y apporter, comptant sur le bon esprit du peuple français, sur l’ union et l’ accord de.s grandes puissances alliées et en particulier sur l’ amitié bienveillante de l’ empereur Alexandre.
Situation actuelle. "Les hommes de la révolution occupent le terrain. Ce sont eux qui semblent nous tolérer et faire grâce aux Français qui ont partagé avec nous les malheurs du temps. Ces gens ne seront jamais les amis du gouvernement légitime”.
Amélioration. "Les anciens serviteurs de la couronne, les grands propriétaires, les hommes ayant des principes moraux et de la religion, - telle est la classe dont il importe d’environner le trône. C’est alors au gouvernement à lui agréger graduellement et progressivement ceux des hommes de la révolution qui sont les plus modérés et qui peuvent le plus facilement s’unir à nous.
Si l’on avait suivi cette marche qui est la plus légale et la plus droite, il n’y aurait peut-être à cette heure plus de partis. La France serait redevenue une seule
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et bonne famille”.
Bon esprit du peuple français. "Le peuple est étranger à toutes les questions qui agitent les salons de la capitale. Il veut la paix et un bon gouvernement. Dès que le gouvernement est bon, le peuple ne se mêle plus de savoir à qui il est confié ou si celui qui gouverne, appartient à l’ ancienne magistrature ou à la nouvelle”.
Accord et union des grandes puissances. "Le jour où l’ influence étrangère interviendra dans les affaires intérieures de la France, dans des vues intéressées, la France est perdue et la tranquillité générale sera troublée pour de longues années. Mais l’ influence collective des puissances alliées ne peut point être intéressée, surtout si leur union est cimentée par les principes que professe l’ empereur Alexandre.
C’est de son amitié que la France attend son salut à venir. Pour le présent même ses conseils pourraient opposer une digue au torrent révolutionnaire qui nous menace”.
En répondant à ces ouvertures, je n’ai pas manqué de remonter à l’ époque où l’ exagération du parti le plus dévoué à la cause du trône avait provoqué les mesues que s.a.r. déplorait et qui donnaient en effet un ascendant outré aux hommes de la révolution.
Passant ensuite au plan d’amélioration dont Monsieur venait de tracer les contours, j’ai pris la liberté de lui observer que sa base quoique fondée en justice, ne paraissait pas assez étendue, eu égard à la grande masse d’ intérêts qu’elle devait rassurer et garantir.
J’ajoutai que le peuple français semblait en effet être très étranger à toutes les questions dont s’occupaient les journaux, mais qu’on pourrait également le croire étranger aux sentiments d’amour et de dévouement envers.son gouvernement; que pour s’en convaincre, on n’avait qu’à examiner sa démoralisation, les principes desquels elle dérivait, et les circonstances qui avaient en quelque sorte sanctionné ces mêmes principes sous le régime de la légitimité.
Un pareil peuple peut être poussé très aisément aux délires révolutionnaires. Il se trouverait dans son élément. Par la même raison il semble difficile qu’on puisse le porter à des sacrifices, si le maintien de la royauté légitime pouvait un jour lui en demander.
J’ai terminé ma réponse en observant que l’ accord et l’union intime qui existaient maintenant entre les grandes puissances, donnaient sans contredit la meilleure, si ce n’est la seule garantie du repos général. La France est laissée à elle-même. Il dépend d’ elle de prendre part au système conservateur que les conférences d’Aix-la-Chapelle viennent d’affermir. Il lui est réservé d’en jouir. Mais il ne lui sera jamais permis de le troubler. L’alliance générale est là. Elle s’y opposera de toutes ses forces.
Telle étant la nature des engagements que les puissances ont contractés, la
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France n’a plus à craindre dans ses relations intérieures aucune influence étrangère soit intéressée, soit isolée.
Celle même qui serait collective, ne pourrait plus dans les circonstances actuelles devenir utile à la restauration qu’en s’ étayant de la bonne foi du gouvernement.
Existe-t-elle, cette bonne foi? Peut-on y compter? Les événements qui ont en lieu en France dernièrement et depuis l’année 1814, découragent le zèle le plus persévérant.
Néanmoins ce qui semble impossible et dangereux aujourd’hui, deviendra peut-être facile et salutaire un jour. L’avenir n’est pas entre les mains des hommes. Ce qui est en leur pouvoir, ce sont des intentions pures. La France a éprouvé les avantages de ces dispositions à son égard. Elle les éprouvera toujours.
C’est ici où s.a.r. a parlé des sentiments qu’elle a voués à l’ empereur.
Après quelques instants de silence elle a repris la parole pour détailler les fautes très graves des siens, c’est-à-dire des royalistes. "Je concois très bien que tout ce qui s’est passé et se passe en France nous enlève la confiance des puissances européennes. Mais nous avons besoin de leur indulgence et surtout de leurs bons conseils. Je dis puissances parce que je sais que votre empereur ne veut jamais qu’on parle de lui seul. Mais c’est pourtant à lui seul que nous devons les espérances d’un meilleur avenir et c’est lui qui est appelé à contribuer à leur accomplissement.
En lui présentant mes hommages, rendez-lui compte des voeux que je forme”.
Entretiens avec les ministres
Les ministres sont venus me voir séparément. Notre conversation a commencé toujours par des lieux communs. Tout en tâchant d’écarter les questions du jour et celles de la France, il n’a été impossible de leur échapper sans affecter une retenue qui pouvait donner lieu à plusieurs fausses interprétations. Ces questions donc furent traitées.
J’ai plus écouté que parlé. Le peu d’ observations que j’ai dû faire, semble avoir mérité quelque attention de la part des ministres. Ils y sont revenus.
Ce serait trop long que de rendre compte de ces entretiens en détail. Je les résumerai, en les rapportant aux objets auxquels chacun des ministres voulait évidemment les faire aboutir.
Le premier de ces objets. C’est la considération et la confiance des puissances européennes que les ministres ambitionnent ou semblent du moins ambitionner.
Le second - c’est de nous persuader que la France placée sous la puissance de ses institutions, est et demeurera pour de longues années un Etat éminemment et
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nécessairement pacifique.
Le troisième — que le système actuel n’a pour objet que le maintien et l’ affermissement de la légitimité du trône et de la dynastie régnante.
Ad primum
Les ministres avouent sans hésitation que ce n’est que depuis le mois de janvier que le gouvernement français a pris loyalement et décidément le caractère qui seul peut l’ affermir sur une grande base, sur celle des intérêts de la nation. Ils déclarent d’y avoir contribué et d’y travailler de tous leurs efforts. Ils prétendent que la tranquillité intérieure, que la stabilité du trône commandaient au gouvernement français de se livrer avec un entier abandon à la nation ou, en d’autres termes, aux hommes qui peuvent parler et agir en son nom et dans son esprit.
En partant de ce principe, ils justifient toutes les mesures prises par l’administration et par les chambres dans ces derniers temps, et ils s’en félicitent.
A la suite de ce tableau viennent les observations politiques; l’ Europe, veut-elle une France heureuse, tranquille et forte de l’ unanimité des opinions comme de la garantie de tous les intérêts? Ou bien, veut-elle voir le gouvernement entre les mains d’une minorité impuissante et nullement en état de lutter contre la grande majorité du peuple français?
Si les travaux du ministère et des chambres ont produit durant la session qui vient d’être terminée de bons résultats, des résultats auxquels on ne pouvait même s’attendre, pourquoi douter de l’avenir?
N’en doutant pas, pourquoi les puissances alliées refuseraient-elles leur confiance au ministère actuel?
Réponse. Si les puissances doivent former une opinion sur la situation intérieure de la France, elles ne peuvent la fonder que sur l’expérience du passé.
Or, supposons que la France fût placée l’ année 1815, et durant l’ occupation militaire dans l’ attitude oùelle se trouve depuis le mois de janvier, aurait-elle obtenu les grands avantages que lui procurèrent l’ estime et la confiance qu’a su inspirer son gouvernement d’ alors?
Si la confiance d’alors était véritable et réelle, le gouvernement français d’aujourd’hui ne peut plus y prétendre, à moins qu’une longue série de faits ne dépose pour l’ impartialité de ses intentions, pour la justesse de ses combinaisons et pour la solidité de son système.
Jusque là, la question se présente en ces termes: dans l’hypothèse que le nouveau système adopté au mois de janvier élève de quelques degrés la puissance intérieure du gouvernement, il lui fait perdre dans une proportion parfaitement égale de l’ influence extérieure qu’il avait acquise et dont il fit un honorable usage dans les conférences d’ Aix-la-Chapelle.
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J’ ai démontré cette proposition, en présentant dans tout son jour l’ action pernicieuse qu’exerce sur l’esprit des peuples la propagation des doctrines subversives, colportées, par les journaux livrés aux abus les plus scandaleux de la liberté de la presse. Je me suis d’abord arrêté à ce fait seul, n’ayant pas cru de ma compétence de discuter la question dans ses rapports intérieurs.
M. ,1e marquis Dessolles dns un second entretien est revenu sur cette thèse et a beaucoup instisté afin de connaître mon opinion justement dans la partie que je lui avais déclaré être hors de ma compétence.
"Nous tâchons d’ effacer les souvenirs du passé et de donner à la nation toutes les garanties qu’elle a le droit de nous demander à cet égard. Le gouvernement marche sans difficulté. Jamais la paix et la prospérité intérieure n’a été plus générale, ni plus complète. Vous avez eu lieu de vous en convaincre, en parcourant nos provinces. Que peut-on désirer de plus? Comment pourrionsnous mieux contribuer à l’ afermissement du système européen?”
"Je vous le répète encore une fois, M. le marquis, il ne nous appartient point de révoquer en doute les faits dont vous ne faites l’honneur de me parler. Moins encore pouvouns-nous en juger avant le temps.
Si en effet c’est à la nation et à sa partie saine et non à quelques intérêts du moment que le ministère a voué ses soins et les mesures qu’il a adoptées depuis le mois de janvier, nul doute que le monde entier y applaudira.
Mais il ne se prononcera à cet égard que lorsque le gouvernement à la tête de ses institutions aura pris une assiette forte non du nombre des intérêts personnels qu’il peut favoriser, mais des principes de morale, de justice et de prudence qu’il aura suivis dans son administration.
S’il s’ agit de reconstruire et de consolider ensuitre l’ édifice social en France, peut-on espérer d’y parvenir, en changeant, si des intérêts du jour et des vues personnelles en constituaient les éléments exclusifs?
Or, pourquoi prétendre que les puissances étrangères jugent autrement des plans qu’elles ont vu se succéder dans l’oeuvre de la restauration?
Que l’on considère avec impartialité les événements miraculeux de l’ année 1814, la catastrophe épouvantable de l’année 1815, les négociations et les résultats extraordinaires de cette époque mémorable, l’ occupation militaire et les égards dont la France a été l’ objet, les fruits qu’elle en a recueillis à Aix-la-Chapelle et finalement les changements de système qui viennent de s’opérer ici depuis le mois de janvier, et l’on conviendra que nul antécédent ne favorise la confiance que le gouvernement français semble vouloir inspirer.
Ainsi, s’il trouve à chaque occasion toutes les puissances de l’ Europe réunies sous les enseignes du protocole réservé du mois de novembre, il n’a qu’ à se dire: on a tout fait pour faire sortir la France de cet isolement dangereux et la France n’a rien fait pour s’ associer à la grande alliance. Cette tâche glorieuse vous est réservée, M. le marquis; en la remplissant, vous rendrez un grand
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service à votre partie”.
Le marquis en est convenu. "Et bien, nous allons y travailler et nous y parviendrons en peu le temps, du moins je l’espère”.
Ad secundum
"Que la France sous le régime de ses institutions est nécessairement pacifique. Le serait - elle également, si le système d’une monarchie absolue pouvait s’y établir?”
Sans contester la doctrine, j’ai pu aisément faire comprendre qu’elle ne seblait guère applicable ni au temps actuel, ni aux circonstances, ni à la nature des relations qui constituent la grande alliance européenne.
Qu’au surplus, en parlant des institutions de la France, il faut du moins attendre que le temps et l’ expérience leur donnent assez de consistance et un caractère positif. Celui qu’elles présentent, est bien loin d’offrir la garantie dont il s'agit.
Je suis entré à cet égard dans quelques détails surtout pour ne pas laisser ignorer aux ministres l’ impression qu’avait produite dans l’ étranger la précipitation avec laquelle on réorganisait l’ armée, l’ esprit dans lequel on la réorganisait, l’ exaltation qu’on donnait à cet esprit par les égards et par la prédilection qu’on témoignait aux soldats et aux capitaines qui avaient servi avec zèle un gouvernement conquérant et envahisseur.
"On pense que vous remontez la machine militaire de Bonaparte. La France en a-t-elle besoin? Sa tranquillité intérieure, vous demande-t-elle ce moyen repressif? Donc votre système n’a pas le suffrage de la nation. Ou bien, en devançant le temps et les événements vous jugez nécessaire de constituer de l’armée une puissance qui rend à volonté secondaire celle de la royauté.
Voulez-vous vous servir de l’ armée dans l’ extértieur et où est donc la garantie qu’offrent vos institutions? Comme doctrine elles constituent de la France un Etat éminemment pacifique. Mais dans le fait convenez qu’elles ont une apparence bien contraire”.
Ad tertium
Cette discussion nous a amené plus d’une fois à celle qui regarde l’ affermissement de la dynastie actuelle.
Les ministres se sont efforcés à me persuader que leur travail principal avait pour objet de préparer un règne facile au successeur de Louis XVIII.
M. Decazes s’est cru plus particulièrement appelé à soutenir cette thèse, et à l’ étayer d’ arguments politiques.
Après l’ avoir écouté, je lui ai demandé: "Etes-vous bien sûr de rester le maître des instruments que vous préparez dans cette intention? Lorsque vous
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n’aurez plus rien à donner à l’ armée, restera-t-elle à vos ordres? Les partis qui se forment par la facilité ave laquelle ils obtiennent du gouvernement tout ce qu’ils désirent, ceux que multiplient la liberté de la presse et la mobilité de vos institutions, suivront-ils la direction que vous vous proposez de leur donner?
Et si c’est un autre ministre ou tel membre des chambres qui s’empare de votre ouvrage, croyez-vous pouvoir répondre de l’ emploi qu’il en fera? Sera-t-il, aurant que vous l’êtes, dévoué à la cause du trône?”
M. Decazes a répondu à ces questions d’une manière assez vague et très peu satisfaisante. Il ne s’y attendait point.
"Que pouvons-nous donc faire?” - reprit-il après quelques instants de silence.
"C’est ce que personne au monde ne vous dira. Mais est-il nécessaire de tant faire, si votre nation est tranquille et contente et si elle fonde sa tranquillité dans le bonheur dont elle jouit? Vous supposez une réaction de la part du successeur au trône et vous tâchez de le mettre dans l’ impossibilité de réagir: c’est ce que vous appelez un régne facile.
Mais par l’ alarme que ces mesures précipitées mettent dans les esprits, accréditez-vous la royauté?”
M. Decazes se trouvant un peu embarrasé de ces dilemmes, passa à la grande politique. Et c’est par là que toutes nos conversations se sont terminées.
Toute cette grande politique ne se compose que des notions tirées de la perlustration et des rapports des confidents dont M. Decazes paraît entretenir un nombre considérable.
M. le marquis Dessolles en traitant de la dynastie, a parlé avec l’ accent de la bonne foi. Il a avoué que le peuple français verrait avec la plus grande indifférence toute autre dynastie sur le trône de France et que dans le fond la démoralisation à cet égard était générale.
"Notre peuple veut travailler, se bien nourrir, jouir. Faites le sortir de là. Tout le reste lui est complètement égal.
Il n’y a qu’un moyen de la mener. C’est celui de ne pas le contrarier dans ses opinions en fait de gouvernement et de liberté. A ces conditions il nous obéira.
Nos institutions monarchiques et représentatives sont nouvelels. La nation ne les connaît pas encore. Elle s’ en défie. Elle craint de perdre les avantages que lui a procurés la révolution”.
C’est sur ce ton que le premier ministre, ainsi que ses collègues, m’ont constamment entretenu de la France. Ils n’ont pas dissimulé les grandes difficultés dont ils étaient environnés. Ils se croient néanmoins assez forts pour les vaincre.
Je finirai ce rapport par quelques.
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Observations sur la situation actuelle de la France
En voyant la France à Paris, dans les salons et dans les journaux, on en est ufrayé, on la croit à la veille d’une immense catastrophe. En la considérant par contre dans les provinces et même dans la partie industrielle et manufacturière de la population de sa capitale, elle se présente comme une nation bien ordonnée, heureuse et prospère, qui jouit du présent et qui en jouit d’une manière si calme, qu’elle semble éprouver le sentiment de sa sécurité et de son repos intérieur pour un long avenir.
Aux yeux donc d’un observateur il y a deux Frances bien distinctes: l’une est la France de fait qu’il faut voir en elle-même, l’ autre est la France qu’une poignée d’ hommes renfermés dans la capitale prétend représenter.
La france de fait veut être gouvernée. Mais c’est par la force seule des intérêts matériels qu’on peut y réussir. Les liens moraux qui opèrent, pour ainsi dire, inopinément sur les classes des autres nations et qui deviennent ailleurs des instruments de gouvernement faciles et utiles n’ existent plus en France. La révolution les a brisés. Bonaparte s’est bien gardé de les rétablir. Et le gouvernement actuel n’est pas à même d’y songer avec suite.
C’est de cette circonstance que dépend peut-être en grande partie le calme avec lequel le peuple considère l’agitation qui paraît posséder les ultras, les libéraux et les doctrinaires.
Comme être physique la nation jouit des avantages que lui a procurés la révolution, sans porter plus l’énorme fardeau d’un gouvernement conquérant à grande volonté et à grands moyens d’action.
Le peuple français conserve et utilise ce qu’il possède. Le gouvernement le flatte et n’ose pas même éveiller les consciences et leur faire sentir que sans religion et sans moeurs nulle institution sociale ne peut être de longue durée.
Le peuple est donc tranquille et tolère son gouvernement. Il le croit désormais identifié aux intérêts crées par la revolution.
SI le gouvernement avait su inspirer cette confiance dans la vue de ramener graduellement la nation à cet ordre qui se fonde sur le sentiment du devoir et sur les principes religieux et moraux qui se fonde sur le sentiment du devoir et sur les principes religieux et moraux qui le commandent, ce système aurait peut-être à cette heure considérablement avancé l’oeuvre de la restauration en France et celle de la paix générale en Europe.
Mais il en est autrement. Le ministère actuel veut à tout prix de la popularité et ne sait, ni ne peut l’ obtenir que par des concessions outrées, lesquelles dépassent souvent l’ attente des libéraux, des doctrinaires et des hommes des cent jours. Mais ce ministère et les partis desquels il prétend s’ étayer et qui finiront probablement par s’emparer à'leur tour du gouvernement, trouvent-ils une sage
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et forte résistance dans les royalistes? Il serait difficile de le croire. Les uns comme les autres ne visent qu’à leurs intérêts personnels, et ces derniers ont contre eux l’opinion, les intérêts et toute la force matérielle de la génération formée à l’ école de la révolution et de Bonaparte.
L’anarchie de l’année 1814, les excès du royalisme durant la session des chambres des années 1815 et 1816, les réactions qu’ils ont provoquées, et les excès contraires qu’on déplore maintenant, sont autant de preuves irrécusables d’une vérité affligeante, savoir que depuis l’année 1814 la France n’a pas eu de gouvernement ayant des principes fermes et inébranlables et voulant la restauration par les seuls moyens par lesquels elle peut s’opérer. Les éléments de cette grande oeuvre sont là. Ils ont été méconnus durant l’année 1815 jusqu’ à l’ année 1819, assujettis maintenant à une fusion dangereuse, parce qu’elle excite une fermentation dont personne ne peut calculer les effets.
Ce n’est qu’un homme fort de l’ étendue de ses talents et plus encore de la pureté et de la grande énergie de son caractère qui puisse faire résulter de ces éléments un gouvernement et les faire marcher sur une ligne droite au grande but de la restauration.
Cet homme ne s’est pas trouvé, et on le chercherait eh vain parmi ceux qui se disputent alternativement le timon de l’ Etat.
Que deviendra donc la France? Elle est au bord du précipice. Mais elle ne s’y jettera pas si aisement à moins qu’on ne la pousse.
Elle peut même se sauver. Une forte main, une main seule peut opérer son salut. Mais cette main ne peut être que celle de son gouvernement. Quel que soit le prince légitime qui occupera le trône, un homme de génie et à grand caractère à la tête du ministère et des institutions représentatives et la France rentrera dans l’ ordre des grands Etats et des Etats utiles au maintien de la paix du monde.
Or, la France peut être poussée à une nouvelle catastrophe tant par une brusque réaction intérieure, que par une impulsion du dehors.
Le premier danger n’est pas aussi redoutable que le second. La France peut se préserver de l’une par la force de son bien-être actuel et par une tendance à la passivité, à l’ égoïsme, à l’ indolence qui semble être la sienne après les grandes crises qu’elle a éprouvées. Mais elle ne pourrait opposer une pareille résistance à l’ influence étrangère, agissant par des voies détournées, - par celles de la corruption. En prêtant des forces supérieures à un des partis, l’ influence du dehors pourrait porter les partis contraires à de grands excès.
Si la France pouvait être séparée du reste de l’ Europe et n’ avoir aucune communication avec aucun autre peuple, on pourrait hardiment soutenir qu’ à la suite de longs conflits intérieurs elle finirait cependant par trouver sa ligne de direction pour se placer sur une grande base de prospérité et de puissance.
Le protocole réservé d’ Aix-la-Chapelle pourrait en quelque sorte opérer
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dans le sens moral le même effet qu’opérerait sur la France son isolement et sa séparation des nations européennes, si la démoralisation dont est frappé son peuple, n’avait pas gagné aussi les pays limitrophes et ceux que la guerre a fait sortir de leurs anciennes habitudes et de leurs moeurs.
Cette considération n’ échappe point aux coryphées des différents partis. Les libéraux et les doctrinaires en profitent pour déprécier l’ autorité des gouvernements dans l’ opinion des peuples et pour étayer leur puissance de la puissance démagogique du dehors. Les ultras en profitent aussi pour appeler les gouvernements à une croisade contre les peuples.
Sous ce point de vue la question de la France se rattache en grande partie à celle dont s’ occupent maintemant la Grande-Bretagne et les cabinets allemands, et à celles dont les gouvernements italiens et le roi des Pays-Bas devraient s’occuper avec moins de préjugé et, s’il est permis de le dire, avec plus de justice, de droiture et de courage.
C’est dans un second rapport que je prendrai la liberté de consigner quelques observations à ce sujet.
Η εισήγηση αυτή που συντάχτηκε στο Παρίσι αφορούσε τη γενικότερη κατάσταση και τις κυβερνητικές εξελίξεις στη Γαλλία. Όπως σημείωσε στην αυτοβιογραφία του ο Καποδίστριας, η άνοδος στην εξουσία του νέου πρωθυπουργού Δεκάζ είχε δυσαρεστήσει τον τσάρο, ο οποίος επιφόρτισε τον υπουργό του να προχωρήσει σε διαβουλεύσεις με το γαλλικό περιβάλλον. Πράγματι, ο Καποδίστριας επισκέφτηκε τον βασιλέα της Γαλλίας, που του συνέστησε επίμονα να επισκεφτεί τον Δεκάζ ιδιαιτέρως. «Συνεμορφώθην με την διαταγήν ταύτην, η δε συνομιλία ην ο πρωθυπουργός (της Γαλλίας) έσχε μετ’ εμού είχε τον σκοπόν να μοι γνωρίση τας αποκαλύψεις της υψηλής του αστυνομίας.
«Αι αποκαλύψεις αύται συνίσταντο εις αντίγραφα αρκούντως συχνής αλληλογραφίας μεταξύ του πρίγκιπος Μέττερνιχ και μιας κυρίας2 ης ο σύζυγος κατείχε μεγάλην θέσιν εις την υπηρεσίαν του Αυτοκράτορος της Ρωσίας. Η αλληλογραφία αύτη ωμίλει περί της πολιτικής των δύο κυβερνήσεων, περί των ελπίδων ας οι πραγματικοί θεράποντες των δύο Αυτοκρατόρων ώφειλον να τρέφουν όπως η ρωσική κυβέρνησις απαλλαγή της επαναστατικής μου επιρροής και περί των μέσων άτινα ώφειλον να τεθούν εις ενέργειαν ίνα επιτευχθή τούτο».
Τελικά, ο Καποδίστριας αντέκρουσε τις μομφές που του αποδίδονταν, όμως ήταν φανερό ότι τόσο ο βασιλιάς Λουδοβίκος ΙΗ' όσο και ο Δεκάζ διατηρούσαν τις αμφιβολίες τους3. Παράλληλα, φρόντισε, με την παραπάνω
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εισήγηση του, να ενημερώσει τον προϊστάμενο του για τις επαφές του στο Παρίσι με κορυφαίους Γάλλους αξιωματούχους και τον ίδιο τον βασιλιά Λουδοβίκο. Κυρίαρχο θέμα των συζητήσεων η πρόσφατη κυβερνητική μεταβολή «ην ο Αυτοκράτωρ εθεώρει αντίθετον προς την τήρησιν της τάξεως και της ησυχίας εν τη χώρα ταύτη»4.
1. VPR, τομ. ΙΑ' σ. 55-66.
2. Επρόκειτο για τη σύζυγο του Ρώσου πρεσβευτή στο Λονδίνο Δωροθέα Λίεβεν, βλ. σχετικά J. Hanoteau, Lettres du prince de Metternich à la comtesse de Lieven (1818-1819) Paris (1909) passim.
3. Αρχείον Ιωάννου Καποδίστρια, τομ. A', σ. 55.
4. Αρχείον , ό.π., σ. 54.
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Υπόμνημα προς τον τσάρο της Ρωσίας Αλέξανδρο (Λονδίνο 12/24 Αυγούστου 1819)1
Le lendemain de mon arrivée à Londres de 4(16) août lord Castlereagh est entré en ville et me fit l’honneur de venir me voir.
Les politesses et les amitiés d’usage épuisées, il m’ engagea à passer la journée du 5(17) courant chez lui à la campagne.
Ayant appris que j’allais de même passer une couple de jours chez M. le comte de Lieven dont la campagne est près de la sienne, lord Castlereagh me proposa d’utiliser ce temps comme tout mon séjour à Londres pour des entretiens où il avait l’ intention de me faire connaître la pensée de son gouvernement sur toutes les questions d’un intérêt général et qui sont du ressort de nos cabinets respectifs. Il a fini par m’annoncer qu’il avait expédié un courrier au régent qui faisait une petite course maritime à l’ effet de prevenir s.a.r. de mon arrivée et de prendre ses ordres pour ma présentation, le régent ayant témoigne le désir de m’accorder cet honneur.
J’ai remercié lord Castlereagh de toutes les marques de confiance dont il venait de m’honorer.
Le 6(18) je me suis rendu avec M. le comte de Lieven chez lord Castlereagh. Et ce premier entretien n’a eu pour objet que de prendre note des matières sur lesquelles il se proposait de m’ entretenir. En voici la liste:
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France
Intérieur Extérieur Liquidations Recès territorial Bouillon1
Allemagne
Espagne
Médiation
Ratification du traité des Florides
Expéditions
Colonies
Suède et Danemark
Barbaresques
Nègres
Perse
En nous donnant note de ces questions, lord Castlereagh les a abordées toutes légèrement et m’a engagé à faire lecture au préalable de la correspondance qui y avait trait. Il m’offrit alors de me faire part du mémoire autrichien sur la France qui n’ était pas encore parvenu à la connaissance de M. le comte de Lieven.
France
Lord Castlereagh commence par faire lecture des dépêches et lettres confidentielles qu’il a écrites et reçues à ce sujet depuis le mois de janvier.
Tout en reconnaissant et en déplorant les changements qui se sont opérés dans le système politique intérieur de la France, lord Castlereagh paraît peu disposé à adopter les mesures qui ont été proposées tant par le cabinet autrichien, que par celui de Russie.
Les arguments déployés à ce sujet, sont ceux qui avaient motivé toutes ses réticences lors de la réunion d’ Aix-la-Chapelle.
"Le gouvernement anglais ne peut agir, ni provoquer aucunement la chance d’une action quelconque de sa part dans les affaires françaises que lorsque les événements seront présents et qu’ils seront de nature à procurer au ministère britannique la faveur et l’ appui tout entier de l’ opinion publique de sa nation”.
Hors de ce cas l’ attitude du gouvernement anglais ne peut être qu’expectante, passive et complètement inerte.
Mais il y a plus. Le ministère britannique ne peut et ne doit point se montrer extrêmement éloigné d’accorder un certain degré de confiance au gouvernement actuel de s.m. très chrétienne attendu que des méfiances avouées et surtout
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patentes provoqueraient des effets contraires aux intentions des puissances alliées.
1. On ferait tort à la royauté, la nation française pouvant dès lors la croire liée au système politique des gouvernements contre les peuples.
2. On donnerait une grande popularité au ministère actuel et à son parti et dès lors on le porterait à des mesures de précaution qui dépouilleraient enfin la royauté de tous ses pouvoirs.
3. On exciterait les fureurs de la démocratie britannique, et le gouvernement se placerait dans une fausse position et vis-à-vis de sa nation et vis-à-vis de ses alliés.
Ces observations ont été accompagnées de plusieurs arguments, tendant à prouver la nécessité des ménagements qu’il faut avoir pour le ministère actuel de s.m. très chrétienne.
En partant de là, lord Castlereagh n’a pas eu de difficulté à combattre là proposition faite par la cour d’Autriche et de décliner toute autre qui aurait pour objet:
ou des démarches collectives auprès du gouvernement français, ou bien une attitude quelconque de la part des puissnces qui énoncerait l’ intention de donner suite au protocole réservé d’ Aix-la-Chapelle.
Le cabinet britannique croit ne pouvoir regarder la France que sous les rapports établis par le protocole patent, et que c’est le cas seul foederis et belli prévu par l’ acte réservé qui puisse l’ autoriser à prendre part aux mesures de précaution et d’action que les circonsetances réclameraient de la sollicitude des alliés.
En répondant à cette première partie du long discours de lord Castlereagh, j’ai tâché de soutenir l’ importance majeur qu’il y a de procéder de manière à ce que le ministère français ne se fasse point illusion sur la position où il s’est placé, et sur celle où se trouvent à son égard les puissances alliées. Il serait assurément dans l’ erreur du moment qu’il nous croirait à son égard là où nous étions à l’ égard de la France lors des conférences d’Aix-la-Chapelle. C’est ici où j’ai répété au secrétaire d’Etat britannique tout ce que j’ai dit à s.m. très chrétienne et à ses ministres.
Si ces observations sont fondées sur la vérité des faits, pourquoi les puissances hésiteraient - elles à les faire connaître au gouvernement français?
Si on lui témoigne une confiance qu’il sait ne pouvoir point insprirer, il la croira une déviation de notre système ou du moins une tendance à des combinaisons isolées et partielles.
Si par contre on lui réserve la tâche honnorable de mériter cette confiance par sa conduite, si on lui fait pressentir qu’on en attend les preuves, soit par la nature des élections qui vont avoir lieu, soit par la marche de la législature et du
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gouvernement, on suit une ligne droite et pure à l’ égard de la France, on est conséquent, on met le gouvernement français dans la nécessité de connaître la vérité et de ne pas se méprendre sur les dangers dont il s’ environne. On rassure aussi le monde sur l’ unanimité des conseils qui caractérisent la politique descours alliées.
Toute la question alors se réduit à une question de fait. Si le gouvernement français par sa marche fait des progrès vers l’ affermissement d’un ordre de choses monarchique, légal et constitutionnel, les puissances alliées lui tendront une main fraternelle, il conservera sa place dans la grande alliance, il contribuera au maintien de la paix et du repos général. Dans le cas contraire, il s’ écartera de l’ alliance, et l’ alliance se trouvera de fait opposée ses écarts et prête à la ramener selon les occurrences ou par 1’ ascendant de sa force morale, ou par celui de ses forces militaires.
Les développements de cette idée ont semblé fixer l’ attention de lord Castlereagh. Voyant cependant qu’il était indécis, s’il donnerait suite par une réponsse écrite aux communications qui lui étaient adresseés à ce sujet, j’ai pris la liberté de lui faire observer que son silence ne resterait pas inconnu au gouvernement français, qui semble régulièrement informé des relations les plus intimes des cours alliées et lui des lors serait porté à expliquer ce silence comme une divergence déjà établie entre l’ opinion du cabinet britannique et celui des autres cours relativement à la situation intérieure de la France.
Lord Castlereagh a dû reconnaître l’ urgence et l’ importance de faire réponse à nos communications.
En résumant notre entretien, j’ai cru devoir considérer encore plus particulièrement les points qu’il serait à désirer de voir éclaircis par la réponse de lord Castlereagh.
1. L’ état de la France depuis le mois de janvier, est il ou non plus alarmant? En partageant à cet égard l’ opinion déjà articulée, quoique confidentiellement, par les cours d’ Autriche, de Berlin et de Russie, le ministère britannique donnerait un nouveau degré d’ autorité et de consistance morale à l’ alliance.
2. Dans cette hypothèse et en admettant que pour le moment on convienne de ne procéder à aucune démarche vis-à-vis de la France, ne serait-il pas utile de faire pressentir les clauses des actes d’ Aix-la-Chapelle et surtout celle qui autorise la réunion des cabinets sur l’ invitation qui en serait faite par l’une d’entre eux?
3. Ne serait-il pas également utile de fixer comme l’époque la plus propre à prendre en considération encore une fois la situation intérieure de la France, celle où ce gouvernement se trouvera à faire 1' épreuve de son système, celle savoir où les chambres seront réunies?
Lord Castlereagh a semblé disposé à nous faire connaître positivement l’
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opinion de son gouvernement sur ces points, comme sur la teneur toute entière de nos communications.
Il a paru cependant également incertain sur la réponse à donner aux indications prussiennes concernant la succession et les instructions éventuelles.
Nous avons discuté en détail cette question, et je doute que le cabinet britannique se prononce selon les voeux articulés par la Prusse.
Tout ce qu’on pourra recueillir de la réponse anglaise n’ ajoutera rien à la décision des questions proposées.
Ce sera beaucoup si elle ne s’ écarte de manière à faire illusion au ministère actuel de s.m. très chrétienne.
Ayant traité du même sujet avec le maréchal duc de Wellington, j’ai eu également lieu de me convaincre que son opinion ne différait en rien de celle prononcée par lord Castlereagh.
Pour clôturer l’ article de la France j’ajouterai que le ministère britannique met un grand intérêt à faire participer le gouvernement de s.m. très chrétienne à l’ accession du recès territorial de Francfort, qu’il insiste pour que dans, la question dernièrement élevée quant au payement d’une petite fraction des liquidations, on offre quelques soulagements à la France, en lui procurant la liquidation de ses propres créances, et qu’enfin il demande que les cabinets donnent des ordres à l’ effet de faire intervenir dans l’ affaire contentieuse de Bouillon le ministre français résidant dans le Royaume des Pays-Bas.
Chacune de ces propositions étant assez fondée, je n’ai eu rien à opposer. J’ai observé seulement qu’un empressement trop prononcé de la part de l’une ou de l’ autre des puissances alliées à l’ égard de ces intérêts subalternes, serait sans doute interprété par le gouvernement français d’une manière peu utile à l’opinion qu’on voulait établir d’ailleiurs relativement à l’ unanimité et à l’ uniformité de notre politique envers la France.
Allemagne
Lord Castlereagh considère l’ Allemagne en danger et trouve le principe de ce danger dans la divergence des directions que les gouvernements respectifs ont suivies dans la vue de donner des constitutions à leurs pays. Espérances sur le retour à l’ unanimité de la part des puissances allemandes, espérances sur les conférences de Carlsbad, sur les suites qu’elles auront tant pour contenir et reprimer le mauvais esprit des Allemandes, que pour relever l’ autorité de la diète germanique.
Ne partageant en tout ni ce point de vue, ni ces espérances, j’ai cru devoir lui communiquer avec un égal abandon mes observations toutes particulières à ce sujet. Je ne les répéterai pas ici, parce qu’elles ne portent que sur la manière de considérer le mal existant.
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Les remèdes n’ étant légalement que du ressort des puissances allemandes, je ne suis permis de reproduire ici les principes dont le cabinet de Russie fait une application constante et invariable depuis 1815 dans toutes les affaires germaniques.
Le seul bien que les Etats non allemands puissent faire dans les circonstances actuelles aux gouvernements de la Confédération et à la Confédération elle-même, ne saurait consister que dans la force de leur crédit. Or, ce crédit ne peut être une puissance salutaire qu’autant qu’il ne sera pas usé inutilement et dans des mesures partielles ou du moment.
Lord Castlereagh a semblé goûter cette opinion.
Espagne et Portugal
Après avoir déploré l’ anarchie qui tourmente l’ Espagne et qui menace ce grand Etat d’une catastrophe redoutable, le premier secrétaire d’ Etat s’ est infiniment loué de la conduite conciliante de M. de Tatistcheff et a parlé des avantages qui en résulteraient pour l’ Espagne et pour la cause générale, si le roi Ferdinand se décidait une fois à donner à son gouvernement une base solide et immuable.
Ne l’ espérant point, lord Castlereagh me demanda ce que je présageais:
1) du traité concernant les Florides;
2) de la négociation avec le Portugal et de notre médiation;
3) de l’ expédition qui se préparait à Cadix;
4) et de la pacification des colonies.
L’ayant prié de me faire connaître au préalable sa manière d’envisager ces questions, attendu qu’elles étaient plus à sa portée et que j’ignorais ce qui s’ était passé depuis le mois de janvier, lord Castlereagh me donna, lecture de ses dépêches à M. le marquis de Wellesley et des réponses, ainsi que d’une extrait des instructions dont il munissait le commandant de l’ escadre qui alait mettre à la voile pour le sud de l’ Amérique.
De ces communications il résulte que l’ Angleterre n’a épargné aucun soin afin de porter l’ Espagne à sanctionner le traité des Florides; qu’elle s’ est employée avec une grande activité et persévérance dans l’ espoir d’accélérer la conclusion de l’ affaire du Rio de la Plata; qu’elle ne se faisait point illusion sur l’inefficacité de ses efforts; qu’enfin pour le cas où l’ . expédition espagnole récupérait Montevideo ou quelques - unes des provinces insurgées, le gouvernement britannique devant de son côté soutenir son système de neutralité entre la mère-patrie et les colonies et garantir les intérêts de son commerce, s’étafit vu dans la nécessité de préparer à son tour une grande force navale qui allait être chargée de cette double commission; que l’ Espagne en a été informée et qu’elle n’a semblée nullement mécontente.
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J’ai vivement remercié lord Castlereagh de ces explications. Dans mon particulier, n’ ayant eu à ajouter aucune donnée ultérieure sur l’ état de choses, ni sur les dispositions du cabinet de Madrid, je me suis borné à faire des voeux sincères pour que le Portugal et l’ Espagne se décident une fois à reconnaître leurs véritables intérêts et à s’ arranger.
Le comte Palmella étant sur son départ pour le Brésil et lord Castlereagh mettant un grand prix à faire sentir l’ importance de pousser ce ministre à son poste, je n’ai pas manqué de profiter de cette ouverture pour relever combien le cabinet britannique pourrait de son côté faciliter la conclusion des différends existants.
Toutes les observations que j’ai faites à cet égard, ont été accueillies. Mais ce serait trop prétendre que de les croire adoptées.
Danemark et Suède
L’ entretien a commencé par la lecture des dépèches. L’ arrangement paraît à, la veille de sa conclusion. Il existe encore une seule difficulté. L’ Angleterre comme médiatrice a proposé à la Suède le payement de sa dette en effets ou bons qui resteraient jusqu’ à échéance en dépôt entre les mains du cabinet britannique.
Le roi de Suède s’y refuse. Il ne croit pouvoir donner d’autre garantie que celle des stipulations qui seront insérées dans sa convention avec le Danemark.
C’est à discuter ce point de controverse que lord Castlereagh a consacré une longue instruction dont il munit les ministres britanniques à Stockholm et à Copenhague.
Barbaresques
Lecture de la correspondance ayant trait à la mission anglo-française.
Détails concernant la mission barbaresque arrivée et partie de Lordres.
Espérances d’ un plein succès.
Félicitations de notre part, pourvu que le fait réponde aux voeux que nous formons.
Nègres
Le roi du Brésil n’ avait pas trop répondu à l’ attente du cabinet britannique. Les démarches faites par les souverains lors de la réunion d’ Aix-la-Chapelle, n’ont produit aucun résultat. Le comte Palmella met toujours en avant le traité de commerce. Pour céder sur le point de la traite, il demande que l’ Angleterre modifie certaines clauses du traité.
Lord Castlereagh voudrait reprendre les conférences à ce sujet avec les
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Audience du roi
En me comblant de bontés et après s’ être informé de ma santé et des voyages que je venais de faire pour la rétablir, le roi me demanda: "Que pensez-vous de la France?, Vous venez de parcourir quelques uns de ses départements, vous êtes à Paris. Dites-moi avec franchise, avons-nous fair des progrès depuis l’ année 1815? Est-on content de nous, ou bien a-t-on droit de nourrir des inquiétudes à notre égard?”
"Puisque v.m. l’ ordonne, je prendrai la liberté d’ observer qu’en considérant la France sous les rapports de ses intérêts matériels, elle a fait sans contredit de grands progrès depuis l’ année 1815. Mais pourrait - on en dire autant, en la considérant sous le point de vue de ses intérêts moraux et politiques?”
"Non, — reprit le roi avec vivacité. - Mais comment prétendre en si peu de temps à un si grand résultat?”
"Ce serait trop prétendre, Sire, si l’on s’attendait à voir déjà consommée l’ oeuvre de la restauration morale du peuple français et de son gouvernement représentatif. Mais ce qu’on espérait, c’était de voir avancer cette oeuvre selon les principes immuables qui semblaient avoir servi de base à son commencement".
"Les principes sont les mêmes. Ils sont et doivent être, comme vous le dites, immuables”.
Le roi parla alors longtemps des rapports intérieurs de la France, des peines qu’il se donnait pour le rallier au centre commun du gouvernement représentatif, des entraves opposées par les partis exagérés, de l’ indocilité des uns et des autres, du système du fusion qu’il suit avec persévérance et dans ces derniers temps avec succès.
"Un étranger, Sire, ne peut point en juger. Moins encore oserait - il se permettre une opinion quelconque sur une question de cette nature, lorsque c’est v.m. qui la pose. Aux yeux cependant des cabinets européens le système administratif de la France n’est plus le même depuis le mois de janvier, quelque immuables que v.m. considère les principes sur lesquels il se fonde.
En affaires, tout est action et l’ action d’un gouvernement n’est signalée que par les mesures qu’il prend. Or, la recomposition de votre ministère, Sire, à la clôture des conférences d’Aix-la-Chapelle est un fait qui annonce, ou paraît du moins vouloir annoncer, le renversement du système que le gouvernement français a suivi depuis l’ année 1815, après avoir obtenu des succès que la postérité croira exagérés, pour ne pas dire fabuleux”.
En récapitulant les faits qui viennent à l’ appui de cette observation, il m’a été facile de passer en revue les grands services que le ministère de s.m. avait rendus à la France lors des négociations de Paris de l’ année 1815, durant 1’